Contexte : Les recherches démontrent que le contact intergroupe, en permettant une meilleure connaissance des membres d'un groupe différent du sien, est une méthode efficace pour diminuer l'anxiété ressentie à interagir avec celui-ci et modifier les perceptions sociales que l'on en a (Pettigrew & Tropp, 2008). Cependant, peu d'études se sont intéressées au contact direct intergroupe (CDI) et notamment à son effet à moyen terme sur ces deux paramètres (Maunder & White, 2019). L'objectif de cette étude est d'évaluer l'effet d'un CDI [via un programme d'activité physique adaptée (APA)] sur le niveau d'anxiété d'étudiants encadrant des personnes atteintes d'une déficience intellectuelle ou psychique (DIP) et les perceptions sociales (chaleur et compétence) qu'ils ont de cette population-là. Trois modérateurs sont également pris en compte : le niveau de contact passé, l'expérience professionnelle et l'intention future de travailler auprès de cette population.
Méthodologie : Quarante étudiants en STAPS APA-S (21,9 ± 6,7 ans) ont suivi une UE « Déficience intellectuelle et psychique » et ont reçu des contenus théoriques bio-psycho-sociaux sur cette thématique pendant 2 semaines. Par la suite, ils ont encadré des séances collectives d'APA auprès de ce public (1h/semaine pendant 9 semaines ; CDI) tout en continuant à recevoir des contenus théoriques. Le niveau d'anxiété ressenti à prendre en charge ce public en séances APA ainsi que les perceptions sociales de chaleur et de compétence ont été évalués à partir d'échelles validées en français. Les évaluations ont été réalisées à T0, T1 (2 semaines plus tard ; contact indirect), T2 (à l'issue des 9 semaines d'intervention ; contact direct) et T3 (5 mois après T2).
Résultats : En ce qui concerne l'anxiété intergroupe, l'ANOVA à mesures répétées a révélé un effet du temps, F(3, 111) = 6,20, p < 0,001, ηp² = 0,034. Les tests post-hoc ont montré une diminution significative entre T1 et T2 (p = 0,022) et T1 et T3 (p = 0,003). L'ajout des modérateurs a révélé que les étudiants avec les niveaux de contact passés les plus élevés, une expérience professionnelle antérieure dans le domaine et une intention de travailler avec cette population ont globalement montré les niveaux les plus bas d'anxiété (tous les F ≥ 3,84).
Concernant les perceptions sociales de chaleur et de compétence, les résultats n'ont révélé aucun effet significatif du temps (tous les F ≤ 1,20). L'ajout des modérateurs a révélé que les étudiants ayant l'intention de travailler avec ce public, le percevait comme moins compétent que le groupe n'ayant pas l'intention de travailler avec, F(1, 37) = 5,09, p = 0,030, ηp² = 0,070.
Enfin, en accord avec la littérature (Rohmer & Louvet, 2011), les personnes DIP ont été perçues à T0 comme plus chaleureuses que compétentes (t = 6,30, p < 0,001). Cette différence s'est maintenue à T3, (t = 6,63, p < 0,001).
Discussion / Conclusions / Perspectives : Cette étude a mis en avant que le CDI, au travers de la prise en charge en APA, permet de diminuer à court (i.e., après le contact direct) et moyen terme (i.e., 5 mois plus tard) le niveau d'anxiété des étudiants encadrant des personnes atteintes d'une DIP. Au niveau des perceptions sociales, le CDI n'a pas permis d'améliorer significativement les perceptions de chaleur et de compétence de cette population-là. De plus, l'histoire des individus avec la maladie impacte les niveaux d'anxiété. Par conséquent, de futures études semblent nécessaires afin de mieux caractériser des modérateurs potentiels du CDI et ainsi mieux circonscrire les conditions d'efficacité de ce type de dispositifs intergroupes.
Références :
Maunder, R. D., & White, F. A. (2019). Intergroup contact and mental health stigma: A comparative effectiveness meta-analysis. Clinical Psychology Review, 72, 101749.
Pettigrew, T. F., & Tropp, L. R. (2008). How does intergroup contact reduce prejudice? Meta-analytic tests of three mediators. European Journal of Social Psychology, 38, 922‑934.
Rohmer, O., & Louvet, E. (2011). Le stéréotype des personnes handicapées en fonction de la nature de la déficience. L'Année Psychologique, 111, 69–85.
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