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Freins et leviers au développement des qualités physiques des élèves d'après 2 300 enseignants d'EPS
David Matelot  1@  , Laurent Béghin  2  , François Carré  3  , Jérémy Vanhelst  4  
1 : Université de Bretagne Sud
LabSticc, Lab-STICC
2 : Institute for Translational Research in Inflammation - U 1286
Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Université de Lille, Centre Hospitalier Régional Universitaire [CHU Lille]
3 : Laboratoire Traitement du Signal et de l'Image
Université de Rennes, Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale
4 : CRESS, EREN
Université Sorbonne Paris nord

Introduction

De nombreuses études montrent des liens forts entre les qualités physiques d'aérobie et de force chez les jeunes et des marqueurs de leurs santés actuelle (facteurs de risques métaboliques, santé osseuse, santé mentale) et future (espérance de vie, risque de cancer, risque de maladies mentales). En parallèle, d'autres études montrent une baisse des qualités d'aérobie et de force dans les pays développés. Cette évolution a déjà des effets visibles avec l'augmentation du taux de diabète de type 2 chez les jeunes, ou encore l'âge de plus en plus précoce des infarctus ischémiques en île de France. L'école et en particulier les cours d'EPS apparaissent comme un des lieux importants pour contrer cette tendance et inverser les courbes. Cependant, la question de l'évaluation et du développement des qualités d'aérobie et de force des élèves par les enseignants d'EPS ne semble pas explicitement prioritaire dans la formation initiale et continue des enseignants, ni dans les programmes de la discipline. L'objectif de cette étude était de faire un état des lieux de la prise en compte de cette problématique en interrogeant les enseignants d'EPS eux-mêmes sur leurs pratiques, leurs connaissances, et les freins et leviers identifiés pour mieux prendre en charge les qualités physiques des élèves en cours d'EPS.

Protocole

Tous les collèges et lycées français ont été progressivement contactés pour transmettre un questionnaire à leurs enseignants d'EPS. Ce questionnaire comportait 28 questions, 26 fermées et 2 ouvertes. Il s'inspire notamment de deux études sur le même thème menées au Portugal et en Angleterre. Ce questionnaire était anonyme et conforme au RGPD.

Résultats

Les réponses de 2 378 enseignants des différentes académies ont été obtenues, ce qui représente environ 8% des enseignants d'EPS français. Premièrement, les enseignants ont une connaissance limitée des liens entre les qualités physiques et la santé des élèves. En effet, la grande majorité connaissent les liens entre l'aérobie et la force actuelles et la santé actuelle des élèves. En revanche seuls 40% pour l'aérobie et 22% pour la force connaissent le lien entre ces qualités actuelles chez les jeunes et leur espérance de vie. Les liens avec la santé mentale sont connus par 66% des enseignants pour l'aérobie et 47% pour la force. Seuls 11% des enseignants d'EPS français savent que l'OMS fait des recommandations concernant les activités de force chez les jeunes. Deuxièmement, les enseignants semblent bien formés pour développer l'aérobie mais pas assez pour développer la force chez leurs élèves. En effet 80% s'estiment bien formés pour évaluer et développer l'aérobie de leurs élèves, et 60% disent que leurs élèves font un test aérobie au moins une fois par an (94% au moins une fois pendant leur scolarité dans l'établissement). A l'inverse, 50% des enseignants se disent bien formés pour évaluer la force, et 58% bien formés pour développer la force de leurs élèves. Ils sont 14% à faire faire un test de force au moins une fois par an à leurs élèves (63% ne font jamais ou presque jamais de test de force). Les femmes se déclarent moins bien formées que les hommes. Troisièmement, les enseignants ont fait part des éléments qui pouvaient freiner le développement des qualités d'aérobie et de force des élèves. Pour 83% le temps de pratique est insuffisant pour agir sur ces qualités. Le nombre élevé d'élèves par classe et la forte hétérogénéité sont également des freins rapportés dans les réponses ouvertes. De plus 47% considèrent que les autres objectifs assignés à l'EPS limitent la prise en charge de ces qualités physiques. Les enseignants les plus expérimentés accordent plus d'importance au développement des qualités physiques.

Conclusions

Cette étude permet de proposer des pistes d'amélioration pour mieux prendre en charge les qualités d'aérobie et de force des élèves en cours EPS : prioriser le développement de l'aérobie et de la force dans les objectifs de cette discipline scolaire (ce qui n'est pas contradictoire avec l'enseignement des activités sportives), augmenter le temps de pratique obligatoire de l'EPS, diminuer le nombre d'élèves par classe, améliorer la formation initiale et continue des enseignants sur ce sujet, et enfin mettre à disposition des enseignants d'EPS un observatoire des qualités physiques des élèves, qui leur permettra d'évaluer objectivement et de suivre les qualités physiques de chaque élève.


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