Le lactate : bien plus qu'un simple carburant pour le cerveau
Longtemps considéré uniquement comme un sous-produit de l'effort physique ou comme un simple carburant pour les muscles et les neurones, le lactate connaît aujourd'hui un regain d'intérêt dans le domaine des neurosciences. Cette présentation mettra en lumière un aspect méconnu mais essentiel du lactate : son rôle actif dans la modulation du fonctionnement cérébral.
Lors d'un effort physique intense, comme celui induit par le HIIT (High-Intensity Interval Training, ou entraînement fractionné de haute intensité), l'organisme produit une grande quantité de lactate. Ce composé ne se contente pas de fournir de l'énergie : il agit également comme un messager chimique capable de déclencher des voies de signalisation au sein du cerveau. Ces signaux favorisent non seulement le bon fonctionnement des neurones, mais soutiennent aussi des processus clés comme la plasticité cérébrale — la capacité du cerveau à s'adapter, à apprendre, et à se réorganiser.
Nous explorerons plus particulièrement le rôle du lactate dans deux régions cérébrales fondamentales pour les fonctions cognitives : le cortex et l'hippocampe. Ces structures sont particulièrement sensibles aux effets de l'exercice physique, notamment chez les jeunes, les personnes âgées ou les individus atteints de troubles neurologiques. Des bénéfices cognitifs, tels qu'une meilleure mémoire ou une plus grande flexibilité mentale, ont été observés suite à des programmes d'endurance bien structurés.
Le lactate pourrait également jouer un rôle prometteur dans le domaine de la santé mentale. Certaines recherches suggèrent en effet qu'il contribue à atténuer les symptômes dépressifs, en partie grâce à son action sur des molécules impliquées dans la régulation de l'humeur et la plasticité cérébrale.
Un des mécanismes centraux évoqués dans cette présentation concerne l'influence du lactate sur l'expression de facteurs neurotrophiques : le BDNF (brain-derived neurotrophic factor), le VEGF (vascular-endothelial growth factor), et l'IGF-1 (insulin-like growth factor 1). Ces molécules sont essentielles à la neurogenèse (la naissance de nouveaux neurones), au renforcement des connexions synaptiques et, plus globalement, à l'adaptation du cerveau face à de nouveaux apprentissages ou expériences.
Nous discuterons aussi des effets différenciés selon le type d'exercice d'endurance réalisé. En effet, les modalités d'entraînement influencent la quantité de lactate produite, sa durée de circulation dans l'organisme et donc, son impact potentiel sur le cerveau. À travers cette réflexion, le lien entre muscle et cerveau sera mis en avant, notamment grâce au rôle des myokines, ces molécules libérées par les muscles lors de l'exercice, parmi lesquelles le lactate occupe une place de choix.
Enfin, la présentation s'appuiera à la fois sur des travaux menés chez l'humain et chez l'animal, afin de montrer comment ces deux approches, complémentaires, permettent de mieux comprendre l'impact du lactate sur le cerveau. Les modèles animaux offrent des pistes précises sur les mécanismes moléculaires, tandis que les études cliniques permettent d'évaluer les effets concrets sur la cognition et le bien-être mental.
L'objectif de cette conférence sera donc de mieux cerner la place du lactate produit lors d'un exercice d'endurance régulier, dans l'amélioration de la santé cérébrale, qu'il s'agisse de soutenir les capacités d'apprentissage, de stimuler l'adaptabilité du cerveau face au vieillissement ou encore d'atténuer certains troubles neurologiques ou psychiatriques. En somme, loin d'être un simple résidu de l'effort, le lactate pourrait bien s'imposer comme un acteur central du dialogue entre le corps et le cerveau.
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