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Altération de l'acquisition motrice après privation de sommeil : rôle de l'exercice physique aigu
Guillaume Digonet  1@  , Thomas Lapole  1  , Jérémie Bouvier  1  , Vincent Pialoux  1  , Maxime Pingon  2  , Emeric Stauffer  1, 2  , Ursula Debarnot  1  
1 : Laboratoire Interuniversitaire de Biologie de la Motricité
Université Claude Bernard Lyon 1, Université Jean Monnet - Saint-Etienne, Université Savoie Mont Blanc
2 : Hospices Civils de Lyon
Hôpital Croix-Rousse

Résumé faisant partie du symposium :

Optimisation de l'apprentissage moteur : influence des horaires de l'entraînement, de l'(in)activité physique, et du sommeil 


INTRODUCTION:

L'acquisition d'un nouveau mouvement repose sur des conditions de pratique optimales, déterminantes pour favoriser un apprentissage efficace et en assurer la consolidation à long-terme. La privation de sommeil (PS) entraîne des altérations biologiques, neurophysiologiques et psychologiques, nuisant aux processus mnésiques, contrairement au sommeil de qualité qui soutient la plasticité cérébrale et l'intégration des apprentissages (Kuhn et al. 2016). Si les effets délétères de la PS sur la mémoire déclarative sont bien établis, son impact sur l'apprentissage moteur séquentiel (AMS) reste à ce jour largement inexploré. Parallèlement, plusieurs études suggèrent qu'un exercice physique réalisé juste après l'acquisition d'une habileté motrice favorise sa consolidation (Wanner et al. 2020), en modulant l'excitabilité corticospinale (ECS) et en augmentant la libération de lactate et du facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF), facteur clé de la neuroplasticité mnésique. Cette étude visait (i) à examiner l'impact de la PS avant l'acquisition d'une séquence motrice, et (ii) à évaluer l'effet d'un exercice physique intense (HIIE) sur sa consolidation. Les concentrations de lactate, de BDNF, ainsi que les changements neurophysiologiques induits par la PS et le HIIE, ont également été mesurés.

METHODES:

Quarante-huit participants ont été répartis aléatoirement selon le type de nuit précédant l'apprentissage (sommeil complet, S, ou PS) et l'intervention précédant la consolidation (HIIE ou repos, REST). Les participants apprenaient une séquence bimanuelle de 8-items, répétée le plus rapidement et précisément possible. Les performances (temps moyen et précision) ont été évaluées avant/après l'acquisition, après l'intervention, puis à +24h et 7jours. Des prélèvements sanguins ont été effectués après les types de nuits et les interventions, tandis que les marqueurs neurophysiologiques (ECS et inhibition intracorticale de courte durée, SICI) ont été mesurés avant/après l'acquisition, puis après l'intervention.

RESULTATS:

L'analyse du BDNF ne montre pas de différences après une nuit de S ou de PS. Le temps de réalisation de la séquence motrice durant l'acquisition était altéré après la PS comparativement à S (p = 0.006). Une désinhibition intracorticale a été observée après l'acquisition de l'AMS (p = 0.002), sans variation de l'ECS (p = 0.8), quel que soit le type de sommeil préalable. Une amélioration des performances de l'AMS a été observée aux tests de consolidation à +24h et à 7 jours (p < 0.001), indépendamment du HIIE et du type de nuit. Les niveaux de BDNF et de lactate étaient plus élevés dans les groupes HIIE (p = 0.023 et p < 0.001, respectivement), sans modification de l'ECS ni des SICI après l'intervention.

DISCUSSION:

La PS ralentit l'acquisition de l'AMS, suggérant une altération des processus mnésiques similaires à ceux de l'apprentissage déclaratif. Ce déficit pourrait refléter une atteinte hippocampique, structure clé commune aux deux types d'apprentissage et vulnérable à la PS (Cousins & Fernández, 2019). La désinhibition intracorticale observée après l'acquisition, supposément induite par une modulation de l'activité GABAergique pendant l'apprentissage (Floyer-Lea et al. 2006), reste préservée après une seule nuit de PS, en cohérence avec le maintien des taux de BDNF. La PS n'a pas affecté les performances en consolidation (+24h et 7jours), de la même manière, l'ajout du HIIE n'a eu aucun effet bénéfique sur la consolidation de l'AMS, un résultat cohérent avec la récente littérature sur cette tâche motrice (Cristini et al. 2023). Cette résistance des processus de consolidation, tant comportementaux que neurophysiologiques, après une seule nuit de PS, pourrait s'expliquer par les caractéristiques de la population étudiée, composée de jeunes adultes physiquement actifs, et bons dormeurs.

CONCLUSION:

Cette étude met en évidence l'impact d'une nuit de PS sur l'acquisition d'un AMS, sans effet sur les processus de consolidation. Menée chez de jeunes adultes en bonne santé, elle questionne l'impact d'un endettement chronique, de plus en plus répandu, sur la mémoire et la performance motrice.

REFERENCES:

Cousins, J. N., et al. (2019). In Progress in Brain Research (Vol. 246, p. 27‑53). Elsevier.

Cristini, J., et al. (2023). Neurobiology of Learning and Memory, 205, 107846.

Floyer-Lea, A., et al. (2006). Journal of Neurophysiology, 95(3), 1639‑1644.

Kuhn, M., et al. (2016). Nature Communications, 7(1), 12455.

Wanner, P., et al. (2020). Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 116, 365‑381.


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