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Utilisation des méthodes de Machine Learning dans le suivi de la préparation des Jeux Olympiques des athlètes de l'équipe de France de canoë-kayak : de la détermination de profils spécifiques à la réalité physiologique.
Audric Foucaud  1@  , Henri Meric  1  , Fabienne Durand  1  
1 : Espace Dev UMR 228, UPVD
UM, IRD

Introduction

Le recueil des données d'entrainement des athlètes de haut-niveau est facilité par les objets connectés. Les méthodes d'intelligence artificielle (IA) pourraient permettre de mieux analyser les quantités de données recueillies en vue d'accompagner la performance des athlètes. Cette étude, fondée sur un suivi longitudinal continu durant la préparation des Jeux Olympiques 2024, avait pour objectif d'identifier des profils spécifiques chez les athlètes de l'équipe de France de canoë-kayak à l'aide de méthodes de clustering issues de l'IA.

Méthode

Dix-sept athlètes olympiques français (9 femmes, 8 hommes) des disciplines du slalom et du sprint ont participé à cette étude prospective, dans le contexte de leur préparation aux Jeux Olympiques de Paris 2024.

La charge interne (fréquence cardiaque et sa variabilité, sommeil, fréquence respiratoire, température) a été contrôlée par une bague connectée Oura Ring (1). La charge externe (nombre et durée des entraînements) a été recueillie via une plateforme de gestion de l'entraînement. Le suivi longitudinal lié au port de la bague Oura a duré en moyenne 11.9 ± 1.4 mois. Une analyse par clustering K-means a été appliquée pour identifier des profils physiologiques spécifiques, suivie d'une évaluation statistique des différences intergroupes par le test non-paramétrique de Kruskal-Wallis.

Résultats

L'analyse de clustering appliquée aux données journalières a permis d'identifier quatre profils distincts basés principalement sur les caractéristiques du sommeil et des marqueurs de récupération physiologique : fréquence respiratoire moyenne (F = 335,82, p < 0,001), fréquence cardiaque moyenne (F = 39,16, p < 0,001), temps total d'éveil nocturne (F = 395,36, p < 0,001) et heure de coucher (F = 16584,56, p < 0,001). Ces groupes ont été définis comme suit : « mauvais récupérateurs » (cluster 1), « bons récupérateurs » (cluster 2), « supers-dormeurs » (cluster 3) et « récupérateurs optimisés » (cluster 4).

Par ailleurs, l'analyse intra-individuelle a révélé des comportements physiologiques propres à chaque athlète, malgré une absence de différences anthropométriques ou de dépense énergétique quotidienne notable. Les variables liées au sommeil se sont révélées particulièrement discriminantes entre athlètes, notamment pour la fréquence respiratoire moyenne (F = 3,98, p = 0,038) et l'heure de fin de sommeil (F = 10,30, p = 0,001).

Discussion

Notre principale constatation est le rôle prédominant de la quantité et de la continuité du sommeil dans la stratification de la récupération. Le temps passé au lit et la durée totale du sommeil représentent chacun environ 79 % de la variance entre les clusters (η² = 0,79). Les athlètes classés dans la catégorie des « récupérateurs optimisés » passent en moyenne plus de huit heures au lit par nuit, tandis que ceux classés dans la catégorie des « mauvais récupérateurs » dépassent rarement 6,5 heures. En complément de ces paramètres, l'efficacité du sommeil (η² = 0,70) et la durée du sommeil léger (η² = 0,72) permettent de mieux arbitrer la qualité de la récupération (2).

La variabilité importante observée dans l'heure de fin de coucher met en évidence des routines de sommeil hétérogènes, ce qui est en adéquation avec les résultats journaliers.

La fréquence respiratoire diffère aussi significativement entre individus, révélant potentiellement une réponse ventilatoire résiduelle liée à des perturbations métaboliques persistant après des entraînements intensifs ou prolongés (3).

Conclusion/Perspectives

Notre étude a permis une exploration rigoureuse et multidimensionnelle des profils de récupération chez des athlètes élites sur un cycle olympique complet de préparation.
En plus des quatre profils de récupération, nous avons révélé des modèles distincts de variabilité des variables physiologiques et de sommeil, soulignant l'hétérogénéité des réponses à des conditions contextuelles ou d'entraînement potentiellement similaires.
Ces résultats fourniront des éléments clés aux préparateurs physiques pour individualiser et optimiser les stratégies de récupération et d'entraînement dans le but d'atteindre une performance olympique maximale.

Références

(1) Cao, R. et al. (2022). Accuracy Assessment of Oura Ring Nocturnal Heart Rate and Heart Rate Variability in Comparison With Electrocardiography in Time and Frequency Domains: Comprehensive Analysis. J Med Internet Res, 24(1), e27487.

(2) Diekelmann S, Born J, 2010. The memory function of sleep. Nat Rev Neurosci 11(2):114-26

(3) Borsheim E, Bahr R. (2003). Effect of exercise intensity, duration and mode on post-exercise oxygen consumption. Sports Medicine, 33(14), 1037-1060.

 


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