Introduction
La Mémoire De Travail (MDT) joue un rôle central dans le fonctionnement cognitif en permettant le maintien, la manipulation et l'actualisation des informations issues de l'environnement immédiat [1]. Elle intervient dans un grand nombre de tâches quotidiennes et permet de faire face à des contextes nouveaux. Cependant, il est aujourd'hui établi que le vieillissement est associé à une baisse des capacités de la MDT. Parallèlement, des études suggèrent que l'avancée en âge serait associée à un maintien, voire une amélioration de la régulation émotionnelle. Comparativement à de jeunes adultes, les seniors allouent davantage d'attention aux émotions positives plutôt qu'aux émotions négatives, dans le but d'optimiser leur bien-être. Cette stratégie adaptative, appelé effet de positivité, est de plus en plus documentée [2]. Ainsi, l'impact des émotions sur une tâche de MDT peut exercer une influence sur la vigilance, le temps de réaction ou encore le maintien de l'information, et ce, de manière différente selon l'âge. Par ailleurs, l'Activité Physique (AP) régulière est reconnue comme un facteur protecteur, favorisant à la fois la stabilité émotionnelle [3] et l'amélioration des fonctions cognitives [4]. Dans ce contexte, l'objectif de cette étude est d'explorer les interactions entre Condition Physique (CP), âge et performance en MDT émotionnelle.
Méthode
Des jeunes adultes (18–30 ans) et des personnes âgées (plus de 65 ans) ont été recrutés selon leur niveau d'AP hebdomadaire (moins d'une heure ou plus de quatre heures par semaine). Une évaluation de la CP a été réalisée à l'aide de trois tests : Rockport Walking test, 30 secondes assis-debout, et Handgrip Test. Seuls les participants présentant une CP jugée faible ou élevée, en dehors de la norme, ont été retenus pour l'expérimentation. Lors d'une seconde session, l'état anxieux et dépressif des participants a été évalué avec les questionnaires STAI-Y et Hospital-Anxiety-Depression Scale (HAD) ainsi que l'état affectif via l'échelle Positive Affect and Negative Affect Schedule (PANAS). Deux tâches cognitives ont ensuite été administrées via E-Prime®. La première était une tâche de MDT N-back en condition 2-back sur 72 essais, suivie d'une tâche EmoBack (2-back émotionnel), dans laquelle les stimuli étaient des images issues de la banque IAPS (International Affective Picture System) de valence positive, neutre ou négative. Les participants devaient indiquer si l'image présentée est une « cible » (apparue deux essais plus tôt) ou un « distracteur ». L'expérience comprenait 12 blocs (4 par valence) de 72 essais soit 864 essais au total.
Les performances (temps de réaction et exactitude) ont été enregistrées. Enfin, les participants ont évalué la valence et l'arousal d'une partie des images IAPS présentées à l'aide de l'échelle Self-Assessment Manikin (SAM).
Résultats attendus et perspectives :
L'expérimentation est toujours en cours. Il est attendu que les participants ayant une CP élevée présentent de meilleures performances en MDT que ceux ayant une CP faible, et que les jeunes adultes surpassent les seniors. Concernant ces derniers, un écart de performance plus marqué entre les conditions émotionnelles positives et négatives est anticipé, en lien avec l'effet de positivité, associé à une attention accrue portée aux stimuli positifs avec l'âge [2]. Une régression hiérarchique sera également menée pour estimer les effets respectifs de l'âge, de l'AP et des réponses émotionnelles (valence/arousal perçus) sur les performances cognitives. À plus long terme, une modélisation causale pourrait explorer les interactions entre émotion, AP et MDT.
Références bibliographiques :
[1] Baddeley, A. D., & Hitch, G. J. (1994). Developments in the concept of working memory. Neuropsychology, 8(4), 485–493.
[2] Carstensen, L. L., Isaacowitz, D. M., & Charles, S. T. (1999). Taking time seriously: A theory of socioemotional selectivity. American Psychologist, 54(3), 165–181.
[3] Carek, P. J., Laibstain, S. E., & Carek, S. M. (2011). Exercise for the treatment of depression and anxiety. International Journal of Psychiatry in Medicine, 41(1), 15–28.
[4] Cunningham, C., O'Sullivan, R., Caserotti, P., & Tully, M. A. (2020). Consequences of physical inactivity in older adults: A systematic review of reviews and meta-analyses. Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports, 30(5), 816–827.
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