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Entrainement imposé versus entrainement choisi : comparaison de deux modes de pratique aléatoire, et leurs effets sur la fatigue et la perception de l'effort.
Sylvain Dhote  1@  , Philippe Gimenez  1  , Parriaux Angel  1  , Behava Mélina  1  , Sidney Grosprêtre  1, 2@  
1 : Laboratoire Culture, sport, santé, société - UFC (UR 4660)
Université de Franche-Comté
2 : Institut Universitaire de France
Ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Ministère de l'Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

Introduction

Le principe de spécificité en sciences du sport veut que pour atteindre une performance donnée, le moyen le plus efficace d'y parvenir est la répétition d'un seul et même geste (appelé pratique « par bloc »). S'y oppose la méthode de « pratique aléatoire », -par définition variable et imprévisible- ayant montré des bénéfices au long terme sur des tests de rétention et de transfert, tant au niveau de l'apprentissage (verbal, initialement), que du contrôle moteur (Horbacewicz, 2018 ; Czyż et al., 2024). Cependant deux méthodes sont possibles pour implémenter de l'aléatoire, et leurs effets sur la fatigue neuromusculaire ne sont pas connus. Le but de cette étude était donc de comparer les effets d'une séance d'exercice d'intensité aléatoire, lorsqu'elle est imposée ou choisie par les athlètes eux-mêmes.

Méthode

Vingt-sept jeunes participants en bonne santé ont réalisé 2 séances de 24 minutes de renforcement typique en parkour (axé sur les membres inférieurs), une discipline sportive présentant naturellement un haut degré d'aléatoire. Ils ont effectué ces séances dans 2 conditions : choisie (CHO) dans laquelle ils bénéficiaient d'une autonomie sur la session, et imposée (IMP) dans laquelle ils suivaient un programme aléatoire généré par ordinateur. Les exercices et le nombre total de répétitions étaient identiques dans les deux conditions. La hauteur maximale en saut avec contre mouvement(CMJ), les contractions isométriques volontaires maximales (MViC), l'activité électromyographique (EMG) du vaste médial ont été mesurées avant et après les séances. Les niveaux d'activité (actimétrie) ont été mesurés pendant les séances et les sentiments subjectifs (questionnaire du NASA-TLX, comprenant 6 items différents) ont été évalués à la fin des séances.

Résultats

A la fin de la séance, la MViC d'extension du genou a diminué dans les deux conditions (-8 ± 9 % en IMP, et -12 ± 9 % en CHO, p<0.05). La hauteur maximale atteinte en CMJ n'a pas diminué significativement. Concernant l'activité EMG, on observe une diminution similaire de l'amplitude du signal pour les deux conditions. Les mesures d'actimétrie ont montré différentes organisations temporelles d'activité entre CHO et IMP, avec notamment un plus haut niveau d'activité dans le 3e quart de la séance CHO, et inversement un plus bas niveau dans le dernier quart de la séance. Enfin concernant la perception de l'effort, il n'y eut pas de différence significative sur les items du NASA-TLX. On peut tout de même noter une différence proche du seuil de significativité sur l'item n°6 du questionnaire (degré de satisfaction personnelle, avec p=0.06) plus élevé en CHO qu'en IMP de 4%.

Discussion

L'absence de diminution de la détente verticale malgré la diminution de la force d'extension du genou suggère que la fatigue des muscles quadriceps n'a pas impacté négativement le saut vertical, probablement dû à une compensation des autres groupes musculaires impliqués (extenseurs de hanches et de chevilles). La diminution similaire du signal EMG pour CHO et IMP suggère que la fatigue neuromusculaire induite est comparable entre les conditions. Au niveau de l'actimétrie, le fait qu'en CHO, l'activité était plus importante pendant la troisième phase de la séance et moindre pendant la quatrième met en évidence une stratégie de gestion de l'effort différente. Une part importante de participant (67%) a tiré profit de la condition CHO en organisant son effort d'une manière unique, a priori désorganisée.

Conclusions / Perspectives

Les résultats suggèrent que l'implémentation de l'aléatoire par le biais de la randomisation de l'intensité par ordinateur, ou simplement par l'autonomie des participants, a différentes répercussions au niveau de la répartition et de la perception de l'effort, mais engendre une fatigue neuromusculaire similaire. L'approche d'entrainement aléatoire imposé peut aider les entraîneurs à mieux réguler l'amplitude et la répartition de l'intensité au fil du temps, tandis qu'un entraînement choisi pourrait favoriser un plus grand sentiment d'autonomie et de satisfaction chez les athlètes.

 

Références

Horbacewicz, J. (2018). Effect of Blocked Versus Random Practice on Physical Therapy Students' Manual Force Modulation. Perceptual and Motor Skills, 125(6), 1173‑1185. https://doi.org/10.1177/0031512518797845

Czyż, S. H., Wójcik, A. M., Solarská, P., & Kiper, P. (2024). High contextual interference improves retention in motor learning : Systematic review and meta-analysis. Scientific Reports, 14(1), 15974. https://doi.org/10.1038/s41598-024-65753-3


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