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Corrélats neuronaux de la perception de l'effort et de la douleur lors de l'exécution d'une tâche visuo-motrice.
Ilaria Monti  1, 2@  , Marie-Eve Picard  3  , Thomas Mangin  4  , Mathieu Gruet  5  , Stéphane Baudry  6  , Ross Otto  7  , Jen-I Chen  4  , Mathieu Roy  8  , Pierre Rainville  4  , Benjamin Pageaux  4  
1 : Université de Montréal
2 : Centre de Recherche de L'Institut Universitaire de Gériatrie de Montréal (CRIUGM)
3 : Département de psychologie, Faculté des Arts et des Sciences, Université de Montréal, Montréal, Québec, Canada.
4 : Centre de Recherche de L'Institut Universitaire de Gériatrie de Montréal (CRIUGM), Montréal, Québec, Canada
5 : J-AP2S Laboratory, University of Toulon, Toulon, France
Université du Sud - Toulon - Var
6 : Laboratory of Applied Biology and Neurophysiology, ULB Neuroscience Institute, Université libre de Bruxelles, Brussels, Belgium
7 : Department of Psychology, McGill University, Montreal, QC, Canada
8 : Alan Edwards Centre for Research on Pain, McGill University, Montreal, QC, Canada

Introduction

La perception de l'effort émerge des actions volontaires et reflète leurs coûts, influençant ainsi les décisions d'initier, de maintenir ou d'interrompre une tâche. Il est proposé que la douleur augmente l'effort perçu pour maintenir une même performance (Silvestrini, 2017). La littérature suggère que la douleur et l'effort partagent des substrats neuronaux communs, incluant des régions telles que l'insula, l'aire motrice supplémentaire (SMA) et le cortex cingulaire moyen (MCC) (Misra & Coombes, 2015; Perini et al., 2013; Zénon et al., 2015), supportant une possible interaction entre ces deux expériences. Mais, en effet le réseau neuronal sous-jacent à la perception de l'effort reste moins connu.

Cette étude vise à explorer les mécanismes cérébraux sous-jacents à l'augmentation de la perception de l'effort en présence de douleur. Nous faisons l'hypothèse que : i) réaliser une tâche visuo-motrice en présence de stimulations douloureuses, comparée à des stimulations non douloureuses, augmente la perception de l'effort; ii) l'activité du MCC et de la SMA augmente lors d'une tâche visuo-motrice en présence de douleur.

Méthodes

Quarante participants en bonne santé (50% femmes, 18-40 ans) ont réalisé la tâche visuomotrice dans le scanner d'Imagerie à Résonance Magnétique (IRM) en présence de douleur ou de chaleur (contrôle). La tâche consistait à réaliser des contractions isométriques à 5% ou 30% de la force maximale volontaire afin de matcher le plus précisément possible une ligne à l'écran pendant 15s. La perception de l'effort et de douleur/chaleur ont été évaluées après chaque contraction sur des échelles visuelles analogiques.

Résultats

Pour maintenir leur performance, les participants ont rapporté une perception de l'effort plus élevée en présence de douleur qu'en condition chaleur (p < .001). Les analyses IRM ont révélé : a) une activation robuste de plusieurs régions corticales en réponse à la douleur, notamment la SMA/pre-SMA, le MCC et l'insula ; b) des activations significatives liées à la tâche visuo-motrice dans les aires motrices, incluant la SMA, le MCC et le cortex pariéto-occipital. À travers l'analyse de régression paramétrique nous avons observé que les aires cérébrales qui corrèlent avec les évaluations de perception de l'effort sont entre autres la SMA, le MCC (en particulier la zone motrice caudale cingulaire), le cortex somatosensoriel et le cortex pariétal supérieur (q=.05, seuil corrigé). Nous avons aussi observé une corrélation négative entre l'activité des aires du réseau du mode par défaut et les évaluations de la perception de l'effort.

Discussion

Nos résultats comportementaux confirment que maintenir la performance en présence de douleur requiert plus d'effort. L'activité de la SMA et du MCC est liée à la planification et au contrôle moteur. L'activité du cortex somatosensoriel et du cortex pariétal supérieur est liée à l'intégration sensorimotrice. L'activité de ces aires cérébrales est corrélée avec les évaluations de la perception de l'effort, suggérant leur rôle central dans l'intégration des signaux liés à l'effort. Une corrélation négative a été observée entre la perception de l'effort et les aires du réseau du mode par défaut, qui appuie l'idée d'une réallocation des ressources attentionnelles, au profit de processus orientés vers l'action et la régulation de l'effort. 

Conclusion

Ces résultats apportent un nouvel éclairage sur les mécanismes neuronaux de l'effort en contexte douloureux et identifient pour la première fois les aires cérébrales liées à la perception de l'effort. Dans une perspective future, il serait intéressant d'investiguer si la modulation de la SMA et du MCC — notamment par des techniques de stimulation cérébrale non invasive — pourrait moduler la perception de l'effort en situation de douleur.

 

Bibliographie

Misra, G., & Coombes, S. A. (2015). Neuroimaging Evidence of Motor Control and Pain Processing in the Human Midcingulate Cortex. Cerebral Cortex (New York, N.Y. : 1991), 25(7), 1906–1919. https://doi.org/10.1093/CERCOR/BHU001

Perini, I., Bergstrand, S., & Morrison, I. (2013). Where pain meets action in the human brain. Journal of Neuroscience, 33(40), 15930–15939. https://doi.org/10.1523/JNEUROSCI.3135-12.2013,

Silvestrini, N. (2017). Psychological and neural mechanisms associated with effort-related cardiovascular reactivity and cognitive control: An integrative approach. International Journal of Psychophysiology, 119, 11–18. https://doi.org/10.1016/J.IJPSYCHO.2016.12.009

Zénon, A., Sidibé, M., & Olivier, E. (2015). Disrupting the supplementary motor area makes physical effort appear less effortful. Journal of Neuroscience, 35(23), 8737–8744. https://doi.org/10.1523/JNEUROSCI.3789-14.2015


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