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L'intelligence artificielle au service de l'identification des troubles de la marche liés à la neuropathie périphérique.
Antoine Chatrenet  1@  , Julian Rabut  2  , Nathan Marie  3, 4  , Nicolas Peyrot  3@  , Jean Michel Audebrand  5  , Giorgina Barbara Piccoli  6  , Nassib Abdallah  7@  , Pierre Chauvet  2  
1 : Activité Physique, Corps, Sport et Santé
Université Catholique de l'Ouest, IFEPSA
2 : Laboratoire Angevin de Recherche en Ingénierie des Systèmes
Université d'Angers, IMA UCO
3 : Motricité, interactions, performance UR 4334 / Movement - Interactions - Performance
Nantes Université - UFR des Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives, Le Mans Université
4 : Néphrologie et Dialyse
Centre Hospitalier Le Mans (CH Le Mans)
5 : Endocrinologie
Centre Hospitalier Le Mans (CH Le Mans)
6 : Néphrologie et Dialyse
Centre Hospitalier Le Mans (CH Le Mans)
7 : Laboratoire de Traitement de l'Information Medicale, INSERM UMR 1101
Université de Brest, Centre Hospitalier Régional Universitaire de Brest

Introduction

L'une des principales complications du diabète et de la maladie rénale chronique est la neuropathie périphérique (NP). Une NP non diagnostiquée, souvent asymptomatique aux stades initiaux, peut entraîner des complications graves (e.g., amputations multiples ; Pop-Busui et al., 2016). Toutefois, une atrophie des muscles intrinsèques des pieds est observable à l'imagerie avant même l'apparition des premiers symptômes (Greenman et al., 2005). Ce remodelage neuromusculaire précoce se traduit par une altération de la marche et de l'équilibre (Menz et al., 2004).

Malgré sa gravité la NP reste peu dépistée. Il est donc essentiel de développer des méthodes de détection précoce, peu coûteuses et faciles à intégrer en pratique clinique. Cette étude explore l'usage de l'intelligence artificielle (IA) pour analyser la marche à partir de vidéos afin d'identifier des troubles moteurs liés à la NP.

 

Méthode

L'étude clinique s'est déroulée au Centre Hospitalier du Mans (approbation éthique de l'Université Catholique de l'Ouest n°2025-02-00013). Les critères d'inclusions étaient un âge entre 60 et 80 ans, un diabète et/ou une maladie rénale chronique avancée et une capacité de marche sans aide sur 30 mètres. Les maladies perturbant la locomotion autonome, un indice de masse corporelle supérieur à 35 kg/m2 et une dialyse programmée à court terme étaient des critères de non-inclusion.

La NP a été évaluée avec le Michigan Neuropathy Screening Instrument (MNSI). Chaque patient effectuait deux tests de marche 10 mètres filmés avec un téléphone placé dans le plan sagittal à hauteur des genoux, cadrant les membres inférieurs.

Les vidéos étaient analysées avec Python 3.13 grâce au modèle d'IA YOLO v11-pose. C'est un modèle spécialisé dans l'analyse d'images et de vidéos permettant d'identifier la position au cours du temps des chevilles et des genoux afin d'extraire : 1) La longueur du pas normalisé sur la longueur du tibia ; 2) La fréquence du pas ; 3) la vitesse de déplacement des pieds ; 4) aire du trapèze tibial formé par les deux tibia, normalisé par la longueur du tibia ; 5) L'amplitude verticale des chevilles. Chaque paramètre a été testé dans un modèle de régression multiple ajusté sur la direction (aller ou retour), l'âge, le sexe, l'indice de masse corporelle et sur la pathologie initiale, puis présenté avec les estimateurs et intervalles de confiance (IC).

 

Résultats

Sur 61 patients inclus, 29 avaient une NP (47.5%). Parmi les 18 sujets diabétiques, 25 atteints d'insuffisance rénale chronique et 18 atteints des deux pathologies, la répartition de la NP était homogène (50%, 46.7% et 52.9%, respectivement ; p=0.899).

Par rapport au groupe sans NP, la longueur du pas était inférieure dans le groupe NP (-6.3 [-12.6,-0.1 IC] % de la longueur du tibia, p=0.048) alors que la fréquence de pas (-0.042 [-0.100, 0.016] Hz, p=0.152), la vitesse maximale de déplacement des pieds (-19.387 [-71.326, 32.552] px/s, p=0.461), l'aire du normalisée du trapèze tibial (-0.020 [-0.061, 0.020] px2/px2, p=0.322) et la hauteur des pieds à la marche (-2.305 [-18.881, 14.271] px, p=0.783) n'étaient pas différents.

 

Discussion

Cette étude montre une différence de longueur de pas chez les patients atteints de NP, mise en évidence avec un simple outil vidéo. Le point fort de ces résultats réside dans le fait qu'ils sont indépendants de la taille des individus et du mouvement de la caméra avec la normalisation du tibia. Bien que cette approche mérite d'être validée, elle peut représenter un outil assez sensible pour permettre un dépistage précoce de la NP, à large échelle et à moindre coût.

 

Conclusion / Perspectives

La NP induit une modification de la longueur du pas, détectable sur la base d'une vidéo prise lors d'un test de marche de 10 mètres.

 

Références

Greenman, R. L., Khaodhiar, L., Lima, C., Dinh, T., Giurini, J. M., & Veves, A. (2005). Foot small muscle atrophy is present before the detection of clinical neuropathy. Diabetes Care, 28(6)

Menz, H. B., Lord, S. R., St George, R., & Fitzpatrick, R. C. (2004). Walking stability and sensorimotor function in older people with diabetic peripheral neuropathy. Archives of Physical Medicine and Rehabilitation, 85(2)

Pop-Busui, R., Boulton, A. J. M., Feldman, E. L., Bril, V., Freeman, R., Malik, R. A., Sosenko, J. M., & Ziegler, D. (2016). Diabetic Neuropathy: A Position Statement by the American Diabetes Association. Diabetes Care, 40(1)


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