La microgravité constitue un environnement extrême induisant dès les premiers jours de vol spatial des altérations majeures de plusieurs systèmes physiologiques, notamment musculo-squelettique, cardiovasculaire, immunitaire et nerveux. Pour préserver la santé des astronautes lors de futures missions prolongées, il est essentiel d'optimiser les stratégies de prévention du déconditionnement. Dans cet objectif, nous avons lancé le projet collaboratif NEBULA (Nutrition and Exercise Biology for UnLoaded Astronauts), dont la première phase vise à évaluer l'effet d'un programme d'entraînement pré-vol (préconditionnement) basé sur un entrainement combinant travail aérobie et travail en résistance, sur le ralentissement du déconditionnement physiologique au cours des premiers jours d'exposition à la microgravité, dans un modèle préclinique.
Soixante souris mâles C57BL/6J âgées de 16 semaines ont été réparties en 6 groupes (n=10). La moitié des animaux a suivi un programme de préconditionnement de 3 semaines (PreC) combinant un travail aérobie et un travail en résistance, l'autre moitié étant conservée en tant que témoins non entraînés (Ctrl). Tous les animaux ont ensuite été soumis à une suspension des membres postérieurs (hindlimb unloading, HU) pendant 7 ou 21 jours. Des échantillons de tissus (muscle, os, tendon, moelle osseuse, rate, sérum et cerveau) ont été prélevés à trois temps clés : immédiatement après le préconditionnement (HU0), après 7 jours (HU7) et 21 jours (HU21) de suspension.
À HU0, les souris PreC présentaient des performances physiques accrues ainsi qu'une masse et une architecture musculo-squelettiques améliorées comparées au groupe Ctrl. Dans le groupe Ctrl, la HU a rapidement induit un déconditionnement sévère du muscle et de l'os dès HU7, aggravé à HU21. En revanche, dans le groupe PreC, les bénéfices initiaux sur la structure osseuse et musculaire étaient maintenus jusqu'à HU7, avant de décliner à HU21. Fait notable, l'intensité élevée de l'entraînement n'a pas altéré l'intégrité tendineuse ni les fonctions immunitaires, et semble même prévenir la diminution de la neurogenèse adulte généralement observée lors d'un exercice intense ou d'une exposition à la microgravité.
Ces résultats soulignent les bénéfices systémiques d'un préconditionnement physique sur le ralentissement du déconditionnement induit par la diminution des contraintes mécaniques, et renforcent l'intérêt du préconditionnement comme stratégie complémentaire dans les situations où l'exercice physique est limité ou impossible comme lors d'une hospitalisation programmée.
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