Introduction :
Les programmes d'activité physique adaptée (APA) ciblant l'équilibre, le renforcement musculaire et le relevé du sol, comme le programme OTAGO, ont démontré leur efficacité pour prévenir les chutes chez les personnes âgées. Toutefois, leur mise en œuvre à large échelle reste limitée. De nombreuses personnes à risque n'accèdent pas à ces interventions, notamment en raison d'un isolement géographique ou social, d'un manque de moyens de transport, d'une gêne à pratiquer en groupe ou d'une appréhension à pratiquer une activité physique. Afin de lever ces freins, le projet PreFEAR (PREvention of Falls in Elderly using Augmented Reality) propose de transposer le programme OTAGO en réalité augmentée (RA) à l'aide d'un entraîneur virtuel holographique, accessible à domicile. Les objectifs de cette étude sont (1) d'évaluer l'acceptabilité de ce dispositif via le modèle UTAUT2, et (2) d'analyser l'influence de caractéristiques individuelles (âge, genre, expérience en RA) sur l'intention d'utilisation (IC).
Méthode :
Cent cinquante adultes (117 femmes ; âge moyen : 74 ± 7,3 ans ; intervalle : 64–97 ans) ont participé à cette étude. Après avoir visionné une vidéo de présentation du dispositif (5 minutes), suivie d'un temps d'échange, les participants ont complété quatre questionnaires : un questionnaire socio-démographique, l'échelle FES-I (Falls Efficacy Scale – International) pour évaluer la peur de chuter, le questionnaire PAPA (Physical and cognitive Activity Profile for Aging) pour l'évaluation des niveaux d'activité physique et cognitive, et le questionnaire UTAUT2 (Unified Theory of Acceptance and Use of Technology 2), adapté au contexte de la RA. Une régression linéaire multiple pas à pas descendante a été réalisée avec les huit facteurs de l'UTAUT2 : attente de performance, attente d'effort, influence sociale, conditions facilitantes, motivation hédonique, valeur perçue, habitude et intention d'usage. Trois modérateurs ont été intégrés : âge, genre, et expérience en réalité augmentée.
Résultats :
L'intention d'utilisation (IC) est prédite positivement par l'attente de performance (β = 0,18, p < .05), l'attente d'effort (β = 0,38, p < .001), l'influence sociale (β = 1,90, p < .05), la valeur perçue (β = 0,33, p < .0001) et l'habitude (β = 0,51, p < .0001). En revanche, les conditions facilitantes (β = –0,35, p < .01) et la motivation hédonique (β = –2,74, p < .01) ont un effet négatif significatif. Parmi les variables modératrices, le genre (β = –2,31, p < .05) a un effet négatif, tandis que l'expérience en RA (β = 61,35, p < .05) a un effet positif significatif. L'âge n'a pas d'effet direct significatif. Des interactions ont été observées entre âge et influence sociale (négative), âge et motivation hédonique (positive), genre et attente d'effort (négative), genre et conditions facilitantes (positive), et expérience en RA avec plusieurs facteurs. Le modèle final explique 70 % de la variance de l'intention d'utilisation (R² = 0,698).
Discussion :
Les résultats confirment que l'intention d'utiliser un dispositif de RA est fortement liée aux perceptions d'utilité, de simplicité, de coût et d'habitude, mais que ces effets dépendent largement du profil des utilisateurs. L'expérience en RA joue un rôle facilitateur clair. À l'inverse, certains sous-groupes, comme les femmes ou les personnes plus âgées, peuvent percevoir davantage de barrières à l'usage, soulignant la nécessité d'adapter l'accompagnement et la communication autour de ces dispositifs.
Conclusions / Perspectives :
Le dispositif PreFEAR, en proposant une approche autonome et immersive de l'APA à domicile, répond à un besoin d'accessibilité encore peu couvert. Il pourrait à terme compléter les dispositifs existants en milieu institutionnel ou associatif. Des analyses complémentaires sont prévues afin d'intégrer des variables additionnelles telles que la peur de chuter et le niveau d'activité physique ou cognitive dans les modèles prédictifs. Ce projet s'inscrit pleinement dans les objectifs nationaux de prévention de la perte d'autonomie et dans une dynamique d'innovation en santé publique.
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