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L'extrapolation du mouvement visuel dans un contexte de mobilité douce : percevons-nous les usagers urbains de la même manière ?
Anne-Hélène Olivier  1@  , Agathe Bilhaut  2  , Martin Bossard  3  
1 : Nous, virtuels
Univ Rennes, Inria, CNRS, IRISA F-35000 Rennes
2 : Nous, virtuels
Univ Rennes, Inria, CNRS, IRISA F-35000 Rennes
3 : Laboratoire sur la Perception, les Intéractions, les Comportements et la Simulation des usagers de la route et de la rue
Université Gustave Eiffel

Introduction. Dans l'objectif de neutralité carbone et devant l'urgence de réduire les émissions de gaz à effet de serre, les pouvoirs publics promeuvent les mobilités douces et durables, impliquant des politiques de réaménagement urbain. La marche, le vélo et les trottinettes électriques apparaissent comme des solutions à fort potentiel : au-delà de leur faible impact environnemental, la marche et le vélo favorisent aussi l'activité physique et la santé publique. Il est donc crucial de comprendre l'impact de ces politiques sur les interactions entre piétons, cyclistes et trottinettistes afin d'anticiper les conflits et sécuriser les zones partagées. Bien que ces interactions suscitent un intérêt croissant, de nombreuses questions restent ouvertes. La revue de Zhang et al. (2023) souligne notamment la nécessité de disposer de scénarios variés pour mieux saisir la diversité des comportements des usagers vulnérables. Notre étude s'inscrit dans cette problématique : sommes-nous capables d'estimer avec la même précision la position future d'un piéton, d'un cycliste ou d'un trottinettiste ? Plusieurs indices laissent penser que non. D'une part, ces modes de déplacement génèrent des quantités différentes de mouvement local : élevé chez le piéton, réduit chez le cycliste, quasi nul chez le trottinettiste. Or ce type d'information visuelle est utile pour la perception du mouvement lors d'interactions (Lynch 2017) et la perception/discrimination de la vitesse (Ueda 2018). Leurs vitesses de déplacement sont aussi différentes, ce qui influence la perception du mouvement (Rosenbaum 1975). Notre objectif principal est d'évaluer l'effet du mode et de la vitesse de déplacement d'un agent sur notre capacité à extrapoler son mouvement. Nos objectifs secondaires visent à examiner l'effet de la direction du mouvement et de la présence d'autres usagers sur notre capacité à estimer le mouvement d'un agent cible. En effet, les environnements urbains sont visuellement riches, peuplés d'autres usagers pouvant distraire l'observateur (Tong 2024). La direction du mouvement de cet agent peut aussi différer ce qui affecterait l'estimation (Battaglini 2013, DeLucia 1998).

Méthode. Les participants ont été exposés à une simulation visuelle de déplacement dans un environnement urbain, dans lequel un agent virtuel apparaît. En utilisant un paradigme d'occultation de mouvement (Battaglini 2021), l'agent était masqué puis réapparaissait légèrement décalé spatialement par rapport à la position à laquelle il aurait été s'il avait maintenu sa vitesse constante. Les participants indiquaient si l'agent est réapparu au bon endroit, en avance ou en retard. Une procédure psychophysique adaptative en « staircase » a été utilisée. Le design expérimental était mixte : le mode de déplacement (marche, bicyclette, trottinette) et la vitesse (marche confortable ou typique d'un deux-roues) étaient manipulés en intra-sujets, tandis que la direction du mouvement (orthogonale ou radiale) et la présence d'autres usagers en inter-sujets. Les données issues des courbes psychométriques (seuils et pentes) ont été analysées afin d'en déduire la sensibilité des participants à de petites variations de position au moment de la réapparition de l'agent. Nous présenterons ici les résultats préliminaires de cette étude, qui s'intègre dans un projet financé par la Délégation à la Sécurité Routière visant plus globalement à comprendre les interactions entre les usagers de la mobilité douce.

Références

Battaglini, L., Campana, G., Casco, C. (2013). Illusory speed is retained in memory during invisible motion. i-Perception, 4(3), 180-191.

Battaglini, L., Ghiani,A. (2021). Motion behind occluder: Amodal perception and visual motion extrapolation. Visual Cognition, 29(8), 475-499.

DeLucia, P.R., Liddell, G.W. (1998). Cognitive motion extrapolation and cognitive clocking in prediction motion task. Journal of Experimental Psychology: Human Perception and Performance, 24(3), 901–914

Lynch, S., Kulpa, R., Meerhoff, L., Pettré, J., Crétual, A., Olivier, A.H. (2017). Collision avoidance behavior between walkers: global and local motion cues. IEEE TVCG, 24(7), 2078-2088.

Rosenbaum, D. (1975). Perception and extrapolation of velocity and acceleration. Journal of Experimental Psychology: Human Perception and Performance, 1(4), 395–403. 

Tong, Y., Zhou, T (2024). The effect of background information and motion speed on the performance of TTC estimation. BMC psychology, 12(1), 17.

Ueda, H., Yamamoto, K., Watanabe, K. (2018). Contribution of global and local biological motion information to speed perception and discrimination. Journal of Vision, 18(3), 2-2.

Zhang, C., Du, B., Zheng, Z., Shen, J. (2023). Space sharing between pedestrians and micro-mobility vehicles: A systematic review. Transportation Research Part D, 116, 103629.

 

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